Une vie pour naître
Se reconnaître
Se laisser prendre
Sans vouloir comprendre
Vouloir paraître
Tout ce que l'on est
Mais ne vouloir être
Que ce que l'on fait
Une vie pour naître
Avoir pour maître
L'amour de donner
Et le don d'aimer
Rien vouloir savoir
De tous ses avoirs
Trouver l'avenir
Dans ses souvenirs
Une vie pour naître
Pour se reconnaître
Et s'appartenir
Sans se retenir
Aimer cela même
Que l'on a haï
Ce n'est pas sans haine
Qu'on aime la vie
Une vie pour naître
Apprendre à être
Savoir s'habiter
Et ne posséder
D'or que de soleil
Et lune d'argent
Devenir pareil
Et rester changeant
Une vie pour naître
Et s'envoyer paître
Dans le pâturage
Où poussent les âges
Boire ses décennies
Et commettre ainsi
Le serein suicide
De prendre des rides
Une vie pour naître
Et pour apparaître
Suivre sa fortune
Sans peur ni rancune
Apprendre la joie
Et devenir ivre
À n'être que soi
Et d'aimer se vivre
Une vie pour naître
Mourir et renaître
Une vie pour naître
Une vie pour naître
Ouvrir ses fenêtres
Et savoir plonger
Pour mieux voyager
Prendre tout son temps
Le perdre en riant
Aimer en saison
Perdre sa raison
Une vie pour naître
Et disparaître
Comme un évadé
Du calendrier
Se dire que demain
N'est que le chemin
Que prend l'existence
Pour que tout commence
Une vie pour naître
Pour comparaître
Au jugement dernier
Dont les seuls jurés
Sont un arbre, un livre
D'autres vies à vivre
Par tous ces enfants
Qui auront le temps