Boris Vian Parole de chanson la complainte du progrèsAutrefois pour faire sa cour
On parlait d'amour
Pour mieux prouver son ardeur
On offrait son cœur
Maintenant c'est plus pareil
Ça change, ça change
Pour séduire le cher ange
On lui glisse à l'oreille
- Ah, Gudule!
Viens m'embrasser
Et je te donnerai
Un frigidai-reu
Un joli scootai-reu
Un atomixai-reu
Et du Dunlopillo
Une cuisiniè-reu
Avec un four en ver-reu
Des tas de couvai-reu
Et des pellagâteaux
Une tourniquette
Pour faire la vinaigrette
Un bel aérateur
Pour bouffer les odeurs
Des draps qui chauffent
Un pistolet à gaufres
Un avion pour deux
Et nous serons heureux
Autrefois, s'il arrivait
Que l'on se querelle
L'air lugubre on s'en allait
En laissant la vaisselle
Maintenant, que voulez-vous
La vie est si chère
On dit rentre chez ta mère
Et l'on se garde tout
- Ah, Gudule!
Excuse-toi
Ou je reprends tout ça
Mon frigidaire
Mon armoire à cuillères
Mon evier en fer-reu
Et mon poêle à mazout
Mon cire-godasses
Mon repasse-limaces
Mon tabouret à glace
Et mon chasse-filous
La tourniquette
A faire la vinaigrette
Le ratatine-ordures
Et le coupe-friture
Et si la belle
Se montre encor cruelle
On la fiche dehors
Pour confier son sort
Au frigidai-reu
A l'efface-poussiè-reu
A la cuisiniè-reu
Au lit qu'est toujours fait
Au chauffe-savates
Au canon à patates
A l'eventre-tomates
A l'écorche-poulet
Mais très très vite
On reçoit la visite
D'une tendre petite
Qui vous offre son cœur
Alors on cède
Car il faut qu'on s'entraide
Et l'on vit comme ça
Jusqu'à la prochaine fois
Et l'on vit comme ça
Jusqu'à la prochaine fois